Le kibboutz est une forme de communauté agricole collective et coopérative qui a vu le jour en Israël au début du 20e siècle. Il représente un modèle unique de vie communautaire où les membres partagent les biens, les revenus, et travaillent ensemble pour le bien commun. À l’origine fondé sur des idéaux socialistes et sionistes, le kibboutz a joué un rôle central dans le développement de l’État d’Israël et de son agriculture.
Origine et Histoire
Le premier kibboutz, Degania, a été fondé en 1910 près de la mer de Galilée par un groupe de pionniers juifs (les haloutzim) venus d’Europe de l’Est. Ces pionniers, motivés par l’idéologie sioniste, avaient pour objectif de construire une société agricole autarcique sur la terre d’Israël. Leur vision reposait sur des principes d’égalité, de partage des ressources et de travail collectif.
Le kibboutz se distingue par son organisation en propriété collective : la terre, les moyens de production et les infrastructures sont partagés. À ses débuts, les kibboutzim fonctionnaient sur un modèle où tous les membres travaillaient principalement dans l’agriculture, et les décisions étaient prises de manière démocratique, souvent par une assemblée générale.
Chiffre clé : Dans les années 1940-1950, les kibboutzim ont joué un rôle crucial dans l’établissement de nouvelles communautés et dans la défense des frontières lors de la fondation de l’État d’Israël en 1948.
Organisation et Vie dans un Kibboutz
Les kibboutzim étaient fondés sur plusieurs principes fondamentaux :
- Égalité : Tous les membres recevaient la même rétribution, quelle que soit leur tâche. Que l’on travaille dans les champs, dans les cuisines ou dans les écoles, tout le monde contribuait de manière égale au bien-être de la communauté.
- Collectivité : Les revenus générés par le travail des membres étaient mis en commun, et tous les services essentiels (nourriture, éducation, logement, soins médicaux) étaient fournis par la communauté.
- Démocratie : Chaque membre du kibboutz avait un droit de vote égal sur les décisions importantes concernant la gestion de la communauté, y compris les questions économiques et sociales.
- Autonomie : Les kibboutzim visaient l’autosuffisance, produisant leur propre nourriture et biens de consommation, mais aussi, dans de nombreux cas, développant des entreprises industrielles.
Exemple : Le kibboutz Yagur, fondé en 1922, est l’un des plus grands et des plus prospères kibboutzim d’Israël, initialement centré sur l’agriculture, mais aujourd’hui diversifié dans des secteurs tels que l’industrie.
Le Rôle des Kibboutzim dans le Développement d’Israël
Les kibboutzim ont joué un rôle crucial dans la construction de l’État d’Israël, tant sur le plan économique que militaire :
- Agriculture : Les kibboutzim ont été les pionniers de l’agriculture moderne en Israël, utilisant des techniques avancées d’irrigation et de culture. Ils ont contribué à transformer des terres arides en zones fertiles.
- Défense : Dans les années précédant la création d’Israël, de nombreux kibboutzim étaient situés dans des zones stratégiques et ont joué un rôle clé dans la défense des frontières. Ces communautés étaient souvent les premières à être attaquées pendant les conflits.
- Immigration : Les kibboutzim ont accueilli des vagues d’immigrants juifs, notamment après la Seconde Guerre mondiale, leur offrant un cadre pour s’intégrer socialement et économiquement à la société israélienne.
Évolution et Transformations
Avec le temps, les kibboutzim ont évolué en raison de nombreux facteurs, dont les changements économiques et sociaux dans la société israélienne. Dans les années 1980, la plupart des kibboutzim ont été confrontés à une crise financière majeure due à des dettes accumulées et à une compétitivité accrue sur le marché.
- Privatisation : De nombreux kibboutzim ont commencé à se privatiser. Les membres ont reçu des salaires en fonction de leur travail, et la propriété des logements a été transférée aux individus. Bien que la collectivité soit toujours présente, la gestion des ressources est devenue plus individualiste.
- Diversification économique : L’agriculture n’est plus l’activité principale de nombreux kibboutzim. Ils se sont diversifiés vers des secteurs comme le tourisme (hôtels, campings), l’industrie (production de plastique, de produits chimiques), et la haute technologie. Cette diversification a aidé plusieurs kibboutzim à sortir de la crise économique.
Chiffre clé : Aujourd’hui, il y a environ 270 kibboutzim en Israël, bien que leur organisation varie, et beaucoup d’entre eux se sont partiellement ou totalement privatisés.
Vie contemporaine dans un Kibboutz
Aujourd’hui, les kibboutzim ont conservé leur esprit communautaire, mais leur fonctionnement est souvent plus flexible. Bien que certains kibboutzim aient encore une structure collective forte, la plupart ont intégré des éléments de privatisation. Certains offrent des opportunités de vie et de travail pour des non-membres, notamment dans les secteurs du tourisme et de l’agriculture biologique.
- Tourisme : Les kibboutzim proposent souvent des logements touristiques, des visites éducatives, et des expériences agricoles. Ils attirent des visiteurs locaux et internationaux intéressés par le mode de vie collectif et les paysages ruraux.
- Travail saisonnier : De nombreux jeunes étrangers, souvent des volontaires ou des travailleurs saisonniers, viennent passer du temps dans les kibboutzim pour travailler dans les champs ou dans l’industrie, tout en découvrant la culture israélienne.
Critiques et Défis
Le modèle du kibboutz a été salué pour sa solidarité et son esprit communautaire, mais il a aussi été critiqué pour son rigorisme idéologique dans ses premières décennies. Le rejet de la propriété privée et l’égalitarisme strict étaient parfois source de tensions internes, notamment lorsque les aspirations individuelles entraient en conflit avec l’intérêt collectif.
De plus, la modernisation et la privatisation ont soulevé des questions sur la survie du modèle traditionnel du kibboutz, alors que les valeurs communautaires originelles se diluent dans une société israélienne plus individualiste.
Conclusion
Le kibboutz est un phénomène unique dans l’histoire de l’agriculture et du socialisme, et il a joué un rôle déterminant dans la construction de l’État d’Israël. Bien que ce modèle ait évolué et se soit adapté aux changements socio-économiques, il continue de représenter un symbole de solidarité et d’innovation communautaire. Les kibboutzim modernes naviguent entre préservation des valeurs collectives et adaptation aux réalités du marché, et ils demeurent une partie intégrante de la culture et de l’économie israéliennes.